"Les oubliées"

Parade à Lille en décembre 1914. Source: Wikipedia, CCO
Parade à Lille en décembre 1914. Source: Wikipedia, CCO

Situation lors de l'invasion des Allemands

Source: Reims.fr
Source: Reims.fr

Si certains belges et français, en raison de la réputation de cruauté des Allemands fuient en 1914, d'autres décident de rester. Les Allemands pillent, réquisitionnent, incendient, déportent, violent, fusillent, imposent le travail forcé et de fait ne respectent pas les engagements de la Convention de la Haye de 1907.

Béatrice Mailliard, épouse du français Evence Mailliard, le plus important industriel de Maroilles, sera sommée de nourrir les gradés et de faire goûter à sa fille devant eux les plats et verres de vin. Elle en témoigne dans son livre écrit en 1934 "Une famille en pays envahis".

Mais le début du conflit est véritablement marqué par des déportations dans des camps allemands; nous pouvons citer Mlle Joulin, infirmière de la Croix-Rouge qui a pris la place d'une mère de cinq enfants. On ne connaît que le chiffre des déportations de Lille-Roubaix-Tourcoing: 20000 femmes et jeunes filles. Des témoignages de jeunes filles recueillis après la guerre décrivent des souffrances physiques et morales.

Des françaises furent également violées pendant l'invasion et va se poser la question des enfants "indésirés" de ces actes. D'autres furent confrontées à la prostitution, l'armée allemande l'organisant multipliant les maison de tolérance et "encartant" les filles.

Face à ces crimes, les mouvements féministes se mobilisent afin qu'ils soient dénoncés et qu'ils ne se reproduisent plus.

La vie dans les villes du front

Source: Gallica.bnf.fr
Source: Gallica.bnf.fr

Alors que quelques personnes vivent encore dans les décombres d'Arras, à Soissons, ville occupée, razziée, puis traversée par des tranchées et des fils de fer barbelés, on dénombre quelques 500 habitants. Mme Macherez, présidente de l'Association des dames françaises de la Croix-Rouge, est citée au Journal officiel pour avoir "volontairement assumée la charge et les risques de représenter la ville devant l'ennemi, et défendu avec énergie les intérêts de la population en l'absence du maire et de la plupart des membres du conseil municipal".

Reims est la ville "martyre" de cette période, sans cesse bombardée. Une majorité de femmes et d'enfants y vivent dans des caves de champagne. Les Rémois tiendront trente et un mois de siège jusqu'à l'évacuation générale ordonnée par le gouvernement le 10 avril 1917.

Zones occupées par les Allemands. Source: 87dit.canalblog.com
Zones occupées par les Allemands. Source: 87dit.canalblog.com

Sous l'occupation

Source: Reims.fr
Source: Reims.fr

Les Allemands imposent un des règlements pour tout: défense de sortir après 6 heures du soir, défense de cultiver ses terres sans autorisation, défense de ramasser ses légumes dans son jardin, obligation de saluer les officiers, etc., et en cas de désobéissance, les allemands mettent des amendes, emprisonnent ou donnent des coups.

Les femmes doivent surveiller toutes leurs paroles et leurs gestes.

Lors de la retraite de la ligne Hindenburg, les allemands déportent les personnes aptes aux travail dont des femmes valides.

Ces régions connaissent rapidement : - la pénurie des denrées alimentaires mais aussi de quoi se chauffer,

- une dégradation de la situation sanitaire (épidémies de typhoïde fin 1915-début 1916, de dysenterie bacillaire, une augmentation des décès due à la tuberculose et à une surmortalité générale),

- le chômage avec la fermeture des usines textiles et métallurgiques; l'activité agricole est quant à elle contrôlée dès 1915.

Louise Thuliez. Source: Geneanet.org
Louise Thuliez. Source: Geneanet.org

Les maîtresses des Allemands


A côté des prostituées, il existe les maîtresses des Allemands. Autre réalité, elles sont haïes de la population; on les nomme les "femmes à boches", les "culs à boches".

La femme adultère ou célibataire désorientée qui recherche un peu de tendresse est considérée comme traitre de la patrie.

«Que sont-elles devenues ces "mauvaises femmes" après l'arrivée des troupes françaises? Certaines déjà ont été tondues [...]. D'autres jugées; quelques-unes se sont suicidées. Et puis on a oublié...3».

Les résistantes

Mais bon nombre de femmes ne souhaitent pas subir passivement la situation. C'est ainsi que des institutrices remplacent les maires et conseillers, négocient avec les Allemands; des religieuses ouvrent des écoles et des ambulances, accueillent des orphelins; d'autres veillent aux prisonniers et cachent des réfugiés.

Même si l'on peut citer quelques noms: Mme et Mlle Plank, Mlle Lhotellier, Mlle Joséphine, elles ont sans doute étaient des centaines à résister. Et certainement l'organisation la plus connue est celle de l'Avesnois avec  entre autres Louise Thuliez, Henriette Moriamé, Marie de Croÿ, Béatrice Mailliard et Édith Cavell.

Elles vont être à la tête d'un véritable réseau d'évasion; ce sont les convoyeuses ou girls guides. Afin de mener à bien ces missions, Louise Thuliez s'appelle Jeanne Martin, Marie mouton ou encore Mme Lejeune.


3.  THEBAUD, Françoise. Les femmes au temps de la guerre de 14. Petite Bibliothèque Payot. N°947. Éditions Payot & Rivages, 2013.