Les munitionnettes

Dans l'industrie d'armement, et plus précisément l'industrie chimique et métallurgique, les femmes remplacent les hommes. En 1913, les industries d'armement employaient 5% de femmes, en 1917, elles en emploient 26%.

Contexte dans l'industrie

Avant le déclenchement de la guerre, les femmes représentent une part importante des effectifs industriels, notamment dans l'industrie textile mais aussi dans d'autres activités comme le papier-carton, les raffineries, les conserveries, la métallurgie.

Les progrès de la mécanisation ouvrent la voie au remplacement des hommes par des femmes. En même temps, le travail se réorganise et s'inspire du taylorisme. Cette substitution est à l'origine de la crainte d'une concurrence des femmes moins payées que les hommes. Elle pèsera lourdement sur les rapports  entre les femmes et l'organisation syndicale.

Mais le plus important est de rattraper le retard dans les équipements de l'armée, remplacer le matériel détruit et équiper une armée dont les effectifs sont décuplés.

Source: Ministère des Armées
Source: Ministère des Armées

Définition

Si les usines textiles ont  leurs "midinettes", les usines d'armement ont leurs "munitionnettes".

 

Une munitionnette est une femme travaillant dans une usine d’armement en temps de guerre.

 

Ce surnom vient du nombre inhabituel de femmes employées dans les usines pendant la Première Guerre mondiale du fait de la mobilisation générale des hommes pour le front, plus précisément à partir de 1915 où l'on prend conscience que la guerre va durer.

Lieu de travail

Les principaux sites de travail sont les poudreries du Midi dont celles de Toulouse, les entreprises Citroën et Renault à Paris, l'Arsenal à Brest, ou encore des coins reculés comme la vallée de la Romanche, etc.

Conditions de vie

Immigrées de toute la France, les femmes répondant aux offres dans ces usines sont accueillies dans des cantonnements de premières nécessités: dortoir et réfectoire. Ils ne respectent pas les conditions règlementaires d'hygiène. Il faudra attendre 1916 pour voir créer une inspection des cantonnements proposant des règles de construction et d'équipements.

 

Conditions de travail

  • Suppression des lois de protection du travail: par exemple, l'interdiction du travail de nuit est suspendue, les contraintes en matières de protection de la santé sont levées.
  • Des besoins de production militaire énormes qui engendrent une cadence infernale pour les ouvrières.
  • Des tenues de travail inadaptées à l'utilisation des machines provoquant de nombreux accidents.
  • Un travail dangereux lié aux secteurs d'activités (poudreries, cartoucheries, fabriques de grenades) et difficile: 10 à 12 heures de travail par jour.
  • Des salaires supérieurs à ceux qu'elles avaient avant mais des discriminations toujours présentes.
  • Des relations de travail compliquées: surveillance étroite, interdiction de bavarder et de se déplacer sans autorisation



Source: Gallica.bnf.fr
Source: Gallica.bnf.fr

Femmes en grève

Toutes ces conditions vont affecter les femmes de telle sorte qu'elles vont entrer en lutte, notamment dans les régions parisiennes, lyonnaises et stéphanoises alors que syndicalistes et ouvriers craignent la concurrence féminine après la guerre.

 

À partir de la fin 1916, c’est le début d’une vague ascendante de grèves et de luttes dans toute l’Europe qui durera jusqu’en 1923, avec des poussées révolutionnaires en Russie, Allemagne, Hongrie, Italie, et de très grandes vagues de grèves en France et en Grande-Bretagne.
En France, il y avait 9 000 grévistes en 1915, il y en aura 41 000 en 1916, et 436 000 en 1917. Les ouvrières de l’habillement, puis les "munitionnettes", s’illustrent à la fin de l’année 1916 dans les usines de guerre. Pour tenter de juguler la crise, le ministre socialiste de l’Armement, M. Albert THOMAS, instaure des salaires minima dans l’armement en janvier 1917. Cela ne suffira pas: les grèves repartent au printemps 1917, et atteignent un pic au moment où les mutineries sont à leur maximum.
Les premières grèves de 1917 sont encore celles des ouvrières de la couture, les "midinettes" pour la semaine anglaise (pas de travail le samedi après-midi) et des augmentations de salaire. Puis, elles sont rejointes par les « munitionnettes » dont celles de Firminy qui crient: "A bas la guerre, vive la grève, rendez-nous nos maris!". Les cortèges deviennent de plus en plus massifs (54 000 grévistes le 30 mai). Apparaissent les « vive la paix ! » et « à bas la guerre ! ». Les grèves dans la région parisienne sont relayées dans les régions.

Avec la promulgation de la loi du 11 juin qui acte le samedi après-midi libre mais payé, elles obtiennent gain de cause.

Mais les syndicalistes et les ouvriers restent cantonnés sur leurs positions traditionnelles: derrière la femme et l'ouvrière, il y a la mère et la naissance.